Episode 2 – Gaya Feldheim Schorr & Luke Darlison
English version available here
Portés à Marseille par les vents du hasard, la vocaliste israélienne Gaya Feldheim Schorr et le guitariste britannique Luke Darlison nous proposent une mise en musique improvisée de quelques poèmes de l’auteur e.e.cummings. Un dialogue intimiste entre deux funambules de l’improvisation…
Poèmes mis en musique par Gaya et Luke
the first of all my dreams was of
a lover and his only love,
strolling slowly (mind in mind)
through some green mysterious
land until my second dream begins –
the sky is wild with leaves; which dance
and dancing swoop (and swooping whirl
over a frightened boy and girl)
but that mere fury soon became
silence:in huger always whom
two tiny selves sleep (doll by doll)
motionless under magical
forever falling snow.
And quickly this dreamer wept:
and so she quickly dreamed a dream of spring
– how you and i are blossoming
love’s function is to fabricate unknowness
(known being wishless;but love,all of wishing)
though life’s lived wrongsideout,sameness chokes oneness
truth is confused with fact,fish boast of fishing
and men are caught by worms(love may not care
if time totters,light droops,all measures bend
nor marvel if a thought should weigh a star
—dreads dying least;and less,that death should end)
how lucky lovers are)whose selves abide
under whatever shall discovered be)
whose ignorant each breathing dares to hide
more than most fabulous wisdom fears to see
(who laugh and cry)who dream,create and kill
while the world moves;and every part stands still:
if i love You
(thickness means
worlds inhabited by roamingly
stern bright faeries
if you love
me) distance is mind carefully
luminous with innumerable gnomes
Of complete dream
if we love each (shyly)
other, what clouds do or Silently
Flowers resembles beauty
less than our breathing
when god decided to invent
everything he took one
breath bigger than a circustent
and everything began
when man determined to destroy
himself he picked the was
of shall and finding only why
smashed it into because
Interview
Pouvez-vous vous présenter? D’où venez vous, quel est votre parcours musical?
Gaya:
Coucou 🙂 Je suis originaire de Tel Aviv et suis arrivée à Marseille après avoir passé une longue période à New-York. Je pratique essentiellement le jazz et les musiques improvisées, mais j’aime également jouer toutes les chansons que je trouve belles, peu importe leur genre !
J’adore expérimenter et détourner la matière sonore afin de me l’approprier, et j’ai toujours été attirée par les répertoires les plus obscurs/mystérieux/inconnus, essayant de mettre en lumière des artistes ou des chansons oubliées (par exemple sur mon album vous pouvez entendre des compositions et des textes de Connie Converse, une chanteuse et compositrice disparue en 1974 sans avoir jamais été retrouvée).
Luke:
Je viens du Royaume-Uni, mais j’ai des origines métissées. Ma mère est indienne, mon père anglais, et j’ai grandi au Moyen-Orient. Ces origines ont éveillé mon intérêt pour les musiques du monde, et depuis que j’étudie la composition au conservatoire j’ai eu l’occasion de participer à des projets musicaux issus de cultures variées.
Récemment, j’ai pu travailler avec un chanteur traditionnel indien et un orchestre Klezmer, et j’ai développé un intérêt tout particulier pour la musique des Balkans et du Moyen-Orient. Je fais du jazz et depuis que je suis ado j’écoute aussi beaucoup de métal et de musique classique !
Qu’est-ce qui vous a amené à vous installer à Marseille ?
Luke:
La météo, ma copine et le Brexit !
Gaya:
Mmmmh… un concours de circonstances : tomber amoureuse de quelqu’un sur un autre continent, l’apocalypse du Covid à New-York (avec Trump comme « adulte responsable ») + avoir envie de vivre à nouveau au bord de la Méditerranée et de sentir le soleil sur mon visage.
Comment en êtes-vous venus à faire de la musique ensemble ?
On s’est rencontré par un jour ensoleillé à La Plaine (ndlr : quartier de Marseille), et on a commencé à aller aux soirées et jouer des standards ensemble. Comme on était tout les deux intéressés par la composition et l’exploration musicale en dehors des frontières du jazz pur et dur, on a rapidement parlé de travailler un répertoire plus original.
Pouvez-vous expliquer la démarche créative des morceaux que vous proposez ?
Lors d’une de nos sessions, on a évoqué l’idée d’improviser à partir de poèmes qu’on aimait. C’est quelque chose qu’on avait chacun commencé à faire de notre côté avant de se rencontrer, donc ça a été vraiment naturel pour nous de juste commencer à tester ensemble cette idée.
Nous avons enregistré sur un téléphone notre première session, et Luke a transcrit un des morceaux de l’enregistrement. Ensuite, nous avons travaillé sur cette transcription ensemble afin de donner au morceau une forme mieux définie, le transformant en une composition à part entière.
Ce procédé a donné lieu au premier morceau de la vidéo. Pour les suivants, nous avons essayé de retrouver la spontanéité avec laquelle nous avions improvisé ce premier morceau. Les trois morceaux suivants sont entièrement improvisés.
Qu’est-ce qui vous a poussé à faire se rencontrer poésie, jazz et improvisation ? Est-ce un mélange que vous pratiquez souvent ?
Nous aimons improviser avec du texte car la structure du poème est la seule contrainte lors de l’improvisation musicale. Le poème détermine la forme du morceau. Il n’y a pas d’autres contraintes avec cette méthode (pas de tonalité particulière, pas de rythme ou de texture déterminé), ce qui nous permet d’être libres, mais toujours dans le cadre du poème en question. C’est quelque chose que nous faisons souvent mais pas suffisamment !
Pourquoi e.e.cummings et pourquoi ces poèmes en particulier ?
Il se trouve que c’est un de nos auteurs favoris à tous les deux ! En arrivant à Marseille, nous avons chacun de notre côté apporté un recueil de ses poésies, donc cela nous semblait approprié d’utiliser ses poésies pour ce projet. e.e.cummings joue également de manière intéressante avec les formes – ses poèmes ont souvent une métrique irrégulière -si tant est qu’ils en aient une – il coupe ses phrases à des endroits inattendus et son sens de l’humour est à la fois cynique et enfantin. C’est aussi un romantique désespéré et il parle tendrement d’amour avec des références aux saisons, le printemps en particulier. Pour nous, toutes ces caractéristiques sont un terrain de jeu riche et inspirant pour l’improvisation.
Un dernier message pour nos lecteurs/auditeurs ?
Merci d’avoir pris le temps d’écouter et de lire, en espérant que cela vous parle. Nous vous souhaitons un magnifique printemps !
Un grand merci d’avoir accepté cette invitation à participer à « Du Haut de l’Oustalet ». A bientôt sur scène !
Gaya
Luke
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